Iran 7-17 avril 2018

Iran, ça y est ! Nous avons survécu à l’angoisse du départ, avivée par les jours fériés de l’ambassade d’Iran à Paris, qui ne nous a donné nos visas que la veille de notre départ, aux grèves SNCF/RER pour accéder à CDG, aux grèves Air France, pile le jour de notre vol....Bref, nous avons eu un peu de chance, tout s’est bien passé et nous voici à Téhéran, de nuit. Dès l'aéroport, je sens sur moi les regards réprobateurs des hommes, mais surtout des femmes : je ne suis pas couverte, et Alain est furieux contre mon attitude délibérément provocatrice. Bon, allez, je pose mon écharpe sur ma tête...comme ça tout le monde est content... Je vois passer deux « hirondelles » avec leur chador, voilées de noir de haut en bas...

Notre guide et chauffeur Vahid vient de Shiraz et nous accompagne durant tout notre séjour. Il nous annonce tout de go qu’à l’inverse de ses parents, il n’est pas pratiquant, lui croit plutôt en la science et déplore la disparition de Steven Hawkins. Dont acte !
À l’approche de Téhéran je remarque que les ponts, buildings, péages et autres sont décorés de guirlandes lumineuses aux couleurs vives : rouge, orange, violet, bleu, vert...un reste du nouvel an, Norouz, qui  a eu lieu début avril ou tout simplement un goût pour les couleurs ? Je penche plutôt pour la deuxième hypothèse. Pas de grands buildings, mais des autoroutes, ponts et échangeurs, on se croirait à Los Angeles.... Il nous aura fallu 1h1/2 pour rallier notre hôtel. Demain au jour on y verra plus clair !!!!

C’est dimanche, mais la ville est animée, car ici le dimanche, c’est vendredi ! La conduite est sportive, avec 3 voies circulables on en fait 5, et souvent ceux de la voie de droite s'aperçoivent qu'ils doivent aller à gauche, et inversement, ce qui crée... un joyeux b...!

Nous commençons cette journée par la visite du palais de Golestan, demeure des rois de la dynastie Kadjar (fin XVIIIème jusque début XXème), puis celle des Pahlavi. Belle bâtisse aux façades recouvertes de mosaïques colorées, nichée dans un parc agréable, aux bassins rafraîchissants, une constante en Iran.

À l’intérieur des salles somptueuses, notamment celle des réceptions, aux murs tapissés d’éclats de miroir, aux lustres lourds et colorés, au trône imposant chargé de pierres précieuses.

C'est un peu kitsch et chargé, certes, mais ça en impose ! Dans les vitrines tous les cadeaux reçus des ambassadeurs d’Angleterre, Chine, Russie, Japon, France...meubles, porcelaine, ...

Après avoir erré dans le bazar, animé de clientes très souvent avec le chador noir qui les couvre des pieds à la tête, et forts de nos millions de Ryads obtenus dans un bureau de change, nous traversons un parc agréable à l’abri des bruits de la ville et visitons le musée national, où la précision, la finesse de certaines poteries, bijoux, statues plusieurs siècles av JC nous impressionnent. Des statues gigantesques représentant des dignitaires achéménides (environ 500 ans av JC) à la barbe et aux cheveux soigneusement tressés, ravivent les souvenirs de quelque image aperçue jadis dans nos livres d’histoire et nous plongent dans une époque lointaine, je l'avoue, méconnue.

La pause lunch est appréciée, requinqués on repart pour le musée des joyaux : ceux des rois, des shahs, des khans... Le plus gros diamant du monde, dont le double est à la couronne d’Angleterre, une mappemonde en pierres précieuses, où des émeraudes symbolisent les océans, l’Europe est en diamants, l’Afrique en rubis... Les tiares, diadèmes et broches, parures de colliers, bracelets et boucles d’oreille, portés lors des différents évènements, tous rivalisant de finesse, avec des pierres énormes...

Retour à la voiture, au travers des rues organisées ici en corporations : les tailleurs, les plombiers,... A notre demande, nous nous dirigeons au sud pour voir la tour Azédi (paix), magnifique et élégante architecture.

Puis nous rejoignons Isabelle au nord de la ville, au pied des montagnes enneigées. Beau quartier moderne aux buildings et magasins de marques cossus, aux petits cafés engageants. Marie-Christine, en voisine, se joint à nous et les retrouvailles sont chaleureuses. On récupère Yves au restaurant et dégustons des spécialités sur les conseils de nos hôtes. On débat des Iraniens, de l’obligation de se couvrir, des contrôles musclés, de voyages... une bien belle soirée, improbable, mais bien réelle. On rejoint l’hôtel fourbus de cette première journée, pendant laquelle on a quand même parcouru 15 km à pied !

Lundi 9
C’est parti pour Ispahan, capitale de l'empire perse sous les Safavides entre le XVIème et XVII siècle ! À vrai dire je ne suis pas mécontente de quitter le trafic et la poussière de la grand ville. Alain récupère, tandis que je ne peux pas vraiment admirer le paysage : de la rocaille sèche et des bas-côtés jonchés d’immondices.

Étape à mi-chemin à Kashan. Là, la dynastie des Safavides avec Shah Abbas 1er (1571-1629) a fait bâtir une résidence d’été au milieu d’une oasis. L’eau arrive d’une source à 60 km et est domptée dans un jeu de jets d’eau à la pression savamment calculée en fonction de la pente.

Les murs, gaiement décorés de fresques florales, comportent des extraits de ce fameux poète Ferdowsi (940-1010). Les souverains se sont succédés ici, Karim Khan de la dynastie des Zand, la dynastie Kadjar, chacun ajoutant un bâtiment ou enrichissant le jardin d'essences et de bassins. Le hammam n’est plus en service, mais il ne lui manque qu'un peu d'eau et de vapeur pour lui donner vie. C'est là pourtant que fut assassiné Amir Kabir en 1852, chancelier du shah, accusé d'avoir détourné des fonds : déjà vu ???

Dans les rues de Kashan, nous nous enivrons des alambics qui extraient ...l’eau de rose, spécialité du coin.

Plus loin nous visitons la villa Abbasi, demeure d’un riche notable de la fin du XVIIIème siècle, avec cours intérieures, salles de réception, coins et recoins, magnifiquement décorée. Tout est pensé pour apporter la fraîcheur en été (bassins, moucharabiehs, tours à vent) et se préserver du froid en hiver.

Le restaurant adjacent nous offre ses confortables coussins et ses plats délicieux dasn un décor très exotique, j'adore !

Nous repartons pour deux grosses heures de route, toujours rien à signaler, une arrivée en ville avec trafic, bruit et poussière, mais des avenues arborées, des rond points aux parterres fleuris.

Nous allons voir ce fameux pont du XVIIème Siosepol (ou pont des 33 arches) à deux étages, point de rendez-vous incontournable d’Ispahan. Il semble incongru au dessus d’un lit aride : l’eau est détournée environ 4 fois par an pour alimenter Yazd en eau. Nous longeons les berges agréablement aménagées pour rejoindre un deuxième pont semblable mais à un seul niveau. Deux petites pièces centrales sont aujourd’hui des cafés. Mais en poussant par hasard la porte nous tombons sur une partie d’anniversaire privatisée. Nous sommes cordialement invités, présentations, part de gâteau, photos, incroyable ! Dès que la bienséance l’autorise on s’échappe pour rejoindre un 3ème pont sous les arcades duquel des chanteurs a capella font sonner leur belle voix, tandis que d’autres passants, Vahid inclus, reprennent en chœur le refrain de cette chanson apparemment très populaire. Une dernière marche le long des berges pour rejoindre notre pont de départ, cette fois éclairé de façon majestueuse.

Rapide check-in à l’hôtel et on va dîner chez Shéhérazade, restaurant renommé du coin, beaucoup de locaux, c’est bon signe et effectivement on n’est pas déçus ! Même le vieux patron appuyé sur sa canne, vient nous saluer, tandis que la magnifique femme qui dîne derrière nous avec son mari et son petit garçon me fait des signes de la main. L’hospitalité iranienne n’est pas surfaite. Comment font ils pour savoir que je suis étrangère ? J’essaie pourtant de me fondre comme je peux ! Alain y prend tellement goût qu’il voudrait prolonger le port du voile à notre retour : chameau ! Avec tout cela, on a encore parcouru plus de 10km aujourd’hui !


Mardi

Grrr, mettre le voile dès le matin pour aller petit-déjeuner !

Nous poursuivons la visite d’Ispahan en rejoignant la gigantesque esplanade Naghsh-e Jahan (500 m x 160 m), autour de laquelle s’étend le bazar, deux mosquées, un pavillon royal.... À l’origine ici était une pelouse, où les rois de la dynastie safavide, notamment le plus réputé, shah Abbās 1er, passaient en revue leurs armées ou venaient voir s’affronter les joueurs du polo local. Au XVI et XVII ème siècle on a construit deux mosquées, une gigantesque, flanquée de deux médersas ou écoles coraniques, où l’acoustique a été privilégiée. L’autre plus modeste, mais qui a eu notre préférence, a privilégié la lumière filtrant par des fenêtres pour mettre en valeur les décorations subtiles aux dégradés de vert et bleu, aux arabesques graciles. Sur les deux mosquées, s’élèvent le long des arches la vrille bleue, symbole de l’eau, réminiscence de la fleur de lotus présente sur le drapeau iranien. 

Le pavillon royal, Ali Qapu, surplombe cette esplanade avec des piliers faits de cèdres et des fresques florales, certaines rappelant quelque voyage royal en Europe. Au dessus, après un escalier raide, se trouve la salle de musique, où l’on peut aisément imaginer le shah et sa cour...

Le bazar est animé, par les touristes certes, mais aussi par les locaux : orfèvrerie, peinture miniatures sur os de chameau, tapis, faïences d’un bleu vif, et puis aussi, vêtements, tissus, articles pour la maison, épices...

Après une halte déjeuner salvatrice, nous partons voir le Palais Chehel Soutoun, ou palais aux 40 colonnes : une belle pièce d’eau et au fond ce chapiteau supporté par des cèdres entiers (20, mais qui se reflètent dans l'eau, d'où le nom...), où l’on recevait les invités. Plus avant une salle, où les peintures murales dépeignent en détail les différentes batailles des rois contre les uzbeks, turcs, hindous...Ce pays a décidément été malmené...Nous passons quelque temps dans les jardins, à savourer le bruit de l’eau, le chant des oiseaux, les allées fleuries.

Puis nous allons dans un quartier fort sympathique aux rues bordées de petites échoppes et cafés engageants, visiter une église arménienne : 3 millions d’arméniens sont venus se réfugier en Iran, la plus grosse communauté étant à Ispahan.

Une petite pause par l’hôtel avant de ressortir dîner à l’Arakhan. Mon iPhone m’indique 13 km aujourd’hui! Demain on quitte Ispahan, moi j’ai beaucoup aimé !

Mercredi
Nuit pénible, beaucoup de bruit dans cet hôtel avenant, mais tellement mal insonorisé...
En route pour Yazd. L’autoroute trace au milieu du désert, des trains infinis de camions circulent de part et d’autre. Au bout de 2h 1/2 de route on fait une halte à Nain, où une citadelle de pisé était érigée il y a 1200 ans. La mosquée date de la même époque, toute simple, avec pour seul décor le sens artistique de l’architecte qui a tracé des motifs dans la brique et la pierre. Des citernes d’eau (ab anbar) avec des tours à vent pour y amener l’air frais permettent aux habitants d’avoir de l’eau, même si aujourd’hui les canalisations sont des tuyaux modernes.

Nous reprenons la route pour rejoindre Meybod à 1 h de route et faisons halte-déjeuner dans une alcôve d’un caravansérail, assis sur des tapis, soutenus par des coussins moelleux. Vahid une fois de plus nous surprend en choisissant pour nous, notamment un ragoût de lentilles et pois chiches au poivre vert et à la cannelle... hmmm. Notre thé nous désaltère et la petite note sucrée du dessert est une datte...

En face du caravansérail, nous allons voir un yakhchal, réservoir à glace : imaginer une vasque gigantesque profonde de 7 m surmontée d’un dôme de 45 m de forme ovoïde. On empilait la neige en la tassant bien et ainsi on pouvait utiliser la glace pour les denrées périssables, qui transitaient par le caravansérail. Astucieux !

Un peu plus loin, c’est la citadelle Narin Qaleh que nous visitons : elle date de 3000 ans, de l'époque des Mèdes, mais je suppose que ce qu’on en voit aujourd’hui est plus proche du moyen âge, puisque c'est Tamerlan qui l'a détruite. Élevée sur 5 niveaux, on voit encore les chemins de ronde, la citerne et on imagine les salles, réception, repos. Au travers des murs, des briques creuses laissent circuler l’air frais : la clim écologique.

Avant de quitter la ville, un dernier arrêt pour voir une tour circulaire à l’intérieur de laquelle les colonnes contiennent des centaines de niches: c’est un pigeonnier, utilisé autrefois pour recueillir les fientes afin de fertiliser les terres alentour, là encore un bel exemple d’originalité ! Et une bien belle demeure pour ces volatiles !

L’arrivée sur Yazd n’en finit pas : une longue longue succession d’échoppes, de matériaux, de ciment,... Enfin nous nous enfilons sous un passage couvert dans une ruelle étroite et arrivons à notre hôtel historique, vieille bâtisse retapée au patio confortable...

Une brève pause pour récupérer et nous voilà devant le complexe d'Amir Chaghmagh, magnifique endroit cumulant mosquée, caravansérail et bazar, où visiblement nombreux apprécient l’endroit. Beaucoup nous abordent, nous souhaitent la bienvenue, on nous demande beaucoup de photos !

Vahid nous emmène dans les profondeurs d’un bâtiment voir un immense réservoir d’eau, aujourd’hui désaffecté. La ville en comporte plusieurs, certains étaient publics, d'autres, étaient dédiés de façon privative aux riches demeures.

À l’étage supérieur a été installé un gymnase typiquement iranien ou zurkhaneh : une piste circulaire où 5 jeunes gens s’échauffent dans une chorégraphie orchestrée par un meneur dans une cabine surélevée, qui chante au micro et s’accompagne au tambour sur un rythme enlevé. Une cloche marque le début et le fin de chaque exercice.
Une fois échauffés, les athlètes saisissent d’énormes quilles de bois et les manipulent telles des fétus. L’un d’eux se saisit d’un morceau de ferraille relié à ses deux bouts par une longue chaîne sur laquelle sont des genres de castagnettes et là encore nous impressionne par sa dextérité et son apparente facilité à manipuler l'engin, qui doit peser bon poids. Nous apprenons que ces entraînements sont terriblement populaires en Iran, bien qu’en régression aujourd’hui et préparent à la lutte traditionnelle ou varzesh e pahlavani. C’est aussi une façon de canaliser les jeunes des quartiers défavorisés, car outre le développement physique, on leur inculque des valeurs morales et une éthique qui s'apparente à celle des arts martiaux en Asie...

Nous dinons sur un divan dans une magnifique salle de maison ancienne aux boiseries décorées et en compagnie d’un perroquet polyglotte et bavard !

jeudi
On commence notre visite de Yazd par les jardins paisibles de Dowlat Abad, encore une de ces demeures persanes - celle-ci édifiée en 1738 par le gouverneur - où l'eau, les jardins et l'architecture de la maison combinés font de l'endroit un sanctuaire, où se rafraîchir et récupérer du désert avoisinant. Cette maison possède une très haute tour des vents partitionnée en 12 sections, je ne me lasse pas de l'ingéniosité simple, mais efficace, de cette trouvaille. De jolis vitraux multicolores, que nous avons par ailleurs vus dans d'autres palais, empêchent soi-disant les insectes de pénétrer.

Puis nous allons à Ateshkadeh, le temple du feu : les adeptes de Zarathustra ou zoroastriens sont aujourd'hui près de 50 000 en Iran, la majorité sur Yazd. Autrefois, c'était la religion de Sassanides, jusqu'à la colonisation arabe (environ 750 après JC). Leurs préceptes sont simples et sensés, entre autres "bonne pensée, bonne parole, bons actes"...si seulement ! Leur symbole d'homme oiseau, Farvahar, matérialise ces préceptes par des ailes à trois niveaux, reprend celui de l'anneau (fraternité, fidélité), et du soleil. Ils vénèrent les 4 éléments, terre, eau, feu, air, mais ont le culte du feu, et la flamme qui brûle dans ce temple n’a pas été éteinte depuis plus de 1000 ans.

Une petite pause café pour échanger sur la politique...puis nous allons admirer la vue de la ville sur les toits d’une maison de tapis, erreur fatale ...,
mais quel festival de teintes, de dessins, de détails...

Rapide déjeuner, comme toujours dans une belle salle intérieure auprès de bassins et nous errons dans vieux le quartier pour voir encore la prison d'Alexandre, où soit-disant Alexandre le Grand aurait interné des prisonniers, qui seraient alors devenus fondateurs de la ville...légende toutefois démentie. Mais les bâtiments furent réhabilités en medresa et aujourd’hui abritent des artisans créateurs. Au hasard des ruelles pavées, le soleil se réfléchit durement sur le pisé, nous ne sommes qu’au printemps !

Au loin un orage gronde. Nous passons devant une des plus vieilles mosquées du XI siècle, fermée au public.

Petite pause à l’hôtel, puis nous repartons vers les silent towers à l’extérieur de la ville, deux tours au sommet de 2 collines voisines, où les zoroastriens déposaient leurs morts pour ne recueillir que leurs os, qu’on transportait alors plus bas, au pied de la colline, dans de petites pièces en pisé construites à cet effet. Belle grimpette ! Je n'ose imaginer la vie des deux officiants qui vivaient là, au milieu des morts, et bannis des vivants qui craignaient quelque contanmination...

Retour en ville pour dégustation de sucreries locales (gaz) et autres pistaches ou baklava, puis un peu de marche dans le bazar, où je me fais assister par un Suisse Allemand numismate pour négocier une bague en agate orangée.

Nous dînons dans une de ces belles salles sur un divan, délicieuses kefteh et dough maison.

Vendredi
En route pour Shiraz. Les montagnes avoisinantes se sont parées de neige avec les précipitations de cette nuit,

drôle de contraste avec le désert environnant. Le désert, la route.

Halte après 2 h de route environ dans la ville de Abarkuh, où se trouve un cyprès vieux de 4 000 ans.

Plusieurs familles sont venues pique-niquer. Nous allons déjeuner chez l’habitant dans une maison en pisé où sont exposés les objets d’antan : serpe, rouet, métier à tisser, vieux instruments de musique ... Le repas est savoureux et le dough maison (sorte de yaourt liquide au goût salé) particulièrement rafraichissant.

Avant de quitter la ville, on passe rapidement devant la maison de Aghazadeh, demeure avec une tour à vent impressionnante.

Et c’est reparti pour le désert, jusqu’à notre prochaine halte : Pasargades, première capitale historique de l'empire perse. L'endroit attire de nombreux touristes, beaucoup de locaux, et le troquet du coin offre un thé authentique...

Là, nous faisons un bond de 2600 ans en arrière (ca.550 av JC), à l’époque du roi Cyrus, le grand roi des Achéménides, pour lequel fut érigé un mausolée simple, mais magistral, car de proportions équilibrées, constitué de blocs de pierre colossaux montés sur 7 marches énormes.

Au même endroit des fouilles mettent à jour un gigantesque palais, autrefois entourés de jardins et d'eau... L’imagination est mise à rude épreuve, mais les vestiges exposés laissent rêveur.

Nous rejoignons Shiraz. Sur les 5 portes qui donnaient accès à la ville, seule une subsiste, avec des remparts aménagés en promenade, fort bien restaurés. Checking express à notre hôtel puis Vahid nous emmène dans un restaurant à la déco moderne sympa, où nous dégustons des spécialités du coin (Kalam polo). Ma boisson au concombre est très rafraîchissante. Adieux à Vahid qui repart demain pour 12 h de route vers Téhéran, où l'attend une autre mission. Dommage, il nous parle tellement de sa ville depuis une semaine, on aurait aimé poursuivre ensemble !

Samedi
Rencontre avec Fatima, notre jeune guide, très studieuse, très musulmane. Elle a réussi à débaucher son père architecte renommé, qui nous sert de chauffeur ! On commence par les jardins d’Eram, dont l'origine remonte au XIIIème siècle, mais voient leurs derniers aménagements fin du XIXème siècle, avec un palais bien décoré et des allées jonchées de fleurs et d’essences d’arbres diverses le long des pièces d’eau, agrémentées ou non de rocailles... Une belle promenade matinale, que l’on enchaîne avec le tombeau du poète Hafez, vénéré pour avoir mémorisé le coran et écrit des vers à la gloire de dieu. Notre guide elle même nous récite plusieurs versets du coran, et on peut alors sentir la différence entre le farsi et l’arabe.

C’est ensuite le mausolée tout argenté de Ali Ibn Hamzeh, où nous sommes accueillis par un guide religieux, qui nous explique les différences entre chiites et sunnites et les extrémismes salafistes et wahhabites. Un petit message amer sur l’occident, qui soutient l’Arabie saoudite, le Yémen, la Syrie, bref un petit cours de géo/théo/politique....le tout autour d’une tasse de thé !

Après déjeuner, nous allons voir la mosquée rose, Nazir Ol molk, érigée fin XIXème siècle, aux céramiques fleuries tapissant les murs et les niches qui lui donnent son nom. A noter toutefois, quelques céramiques jaunes, spécialité de Shiraz, composées d'or et de pigments. La mosquée d’hiver aux vitraux teintées et aux douze colonnes permet l'entrée de la lumière, tandis que celle d’été, en face, abritée par des arcades et nettement moins décorée, abrite aujourd'hui des artistes, dont un miniaturiste aux tableaux d’une finesse extrême.

Nous enchaînons avec le palais Naranjestan, construit au XIXème par une famille de riches marchands, encore un bel exemple iranien, un beau jardin avec des bassins et des fleurs, une salle de réception toute en éclats de miroir, et des pièces aux portes de noyer incrustées de nacre et aux plafonds de bois décorés de motifs fins et colorés. Deux des pièces portent même des aplats de plâtre, qui font penser aux bonbonnières en Wedgwood !

Puis nous partons nous égarer dans les ruelles du quartier Sang e syah, avec de vieux hôtels pittoresques, que la ville essaie de transformer en quartier piéton et touristique. Au coin d’une rue, le boulanger nous autorise à regarder de plus près comment se fait le sangak, galette de pain cuite sur des billes : surprenant !

Enfin nous allons visiter le tombeau Shah Cheragh des frères du 8ème imam assassinés vers 800. Entrée séparée hommes /femmes, et chador obligatoire pour ces dernières. La visite est menée par des étudiants bénévoles et notre groupe, outre un Français vivant à Dubaï, un Suédois, 2 Mexicains, comprend un Egyptien de 70 ans, vivant en Hollande, qui revisite à sa façon le schisme musulman Shiite Sunnite... au lieu du 1/4 heure prévu, nous passerons 1h 1/2 à philosopher gaiement ! Puis on attend les musiciens qui doivent célébrer aujourd’hui le prophète Mohammed choisi par dieu. Longue attente, mais dans la cour on installe des tapis, les familles patientent tandis que les enfants jouent et que j’admire les femmes qui avec sac à main et enfants à bout de bras arrivent à remettre le chador en place, tandis que les hommes déambulent mains dans les poches : saleté de coutume...

Retour à l’hôtel pour prendre une petite laine, puis on rejoint le restaurant indiqué par notre guide, non sans avoir admiré la citadelle magnifiquement restaurée et éclairée.

Dimanche
Départ 8:00 (avant les bus !) pour rejoindre Persépolis. Nous revoilà partis 2500 ans en arrière. Darius1er décide d’ériger une capitale pour asseoir son empire. Les portes d’entrée étaient colossales, ornées de têtes de taureau. Les visiteurs devaient patienter dans une antichambre pour réclamer audience. On a longtemps cru que le site était réservé pour accueillir toutes les délégations des 28 nations composant l’empire perse afin de célébrer le nouvel an. Mais des écrits en diverses écritures témoignent de l’activité du site par ailleurs. Les bas reliefs ornant les portes, les chapiteaux des colonnes, certaines hautes de près de 20 m, tout démontre que les artistes les plus doués avaient été employés à construire et décorer le site avec finesse. Le détail et la minutie des artistes permet une interprétation de la vie à cette époque, corroborée par les écrits retrouvés. Impressionnant.

Les travaux qui ont reconstitué partiellement certaines parties laissent imaginer la splendeur de ce palais. Il fut malheureusement détruit en grande partie par Alexandre le Grand en 300av JC.

Un peu plus loin, Nécropolis regroupe quatre tombes dans la montagne, violées par l'armée d’Alexandre le Grand, mais dont subsistent des bas reliefs détaillés et puissants à la gloire des rois qui sont enterrés là.

Déjeuner au Shiraz hôtel, qui surplombe la ville. Puis nous allons prendre un peu le frais dans une serre et passons dans le vieux quartier des jardins, aux murs de pisé surmontés de branchages.

Petite pause à l’hôtel et nous repartons vers la Quran gate, la porte, qui initialement renfermait un Coran pesant plusieurs kg, et dont les remparts avoisinants ont été superbement aménagés et éclairés.Au pied des remparts, des musiciens de rue nous offrent une démonstration avec des instruments anciens.

Nous retournons à la cafétéria de l’hôtel Shiraz juste à côté pour admirer de haut la ville éclairée. Un pianiste nous offre quelques minutes de concert appréciées.

Notre guide nous dépose au restaurant Haftkhan (le 7ème Khan), où à l’étage iranien (il y a l’étage italien, l'étage burger, ...) nous nous installons sur des divans blancs, sirotons un apéro (à la rose pour Alain, la fleur d’oranger pour moi), et où je me régale d’un poisson grillé farci avec des aubergines, pistaches et raisins secs. Le taxi qui nous ramène à l’hôtel est tellement content qu'on parle anglais, qu’il appelle sa fille et nous la passe afin qu’elle pratique !

Lundi
Check out, ca sent déjà le départ, mais avant cela on s"achemine vers les bains Vakil,construits en 1760 par Karim khan, où des mannequins et des enregistrements reconstituent l’ambiance d’autrefois dans un décor particulièrement beau.

Nous visitons ensuite le bazar, où je me trouve une belle bague en lapis-lazuli,

que finalement je ne pourrai acquérir, car en la mettant à ma taille, les vendeurs l’ont coincée dans la machine et on ne peut soit-disant pas la récupérer avant le lendemain. Dommage...

On va dans un café, ...où il n’y a plus de café... Scoumoune ?

Visite de l’école coranique,

où le menuisier qui rénove les boiseries des chambres nous montre ses inventions : 90 pièces de bois qui s’emboîtent les unes dans les autres pour former une rosace d’environ 30cm de diamètre avec double vitrage... Une pièce de bois articulée qui peut servir au choix de lutrin, reproduire le signe des astroazuriens, un escalier en double hélice etc... toutes références aux merveilles que nous avons vues.

Nous déjeunons dans un restaurant sombre, animé par un chanteur (on ne s’entend plus), où évidemment il n’y a plus des plats que l’on aimerait (rupture du stock d’aubergines !). Mais le succulent halva en dessert fait passer le tout, et surtout après avoir commenté les vieilles photos exposées au mur, le patron nous fait une démonstration de pain cuit au four, comme en Géorgie. Après la photo d’usage, nous repartons avec 3 pains tout chauds !

Petite pause pour un café serré en face de l’hôtel, un jeune nous aborde et on discute. Il veut nous inviter chez lui, mais hélas ce sera pour une prochaine fois !

Départ pour l'aéroport, adieux à Fatima et son père, je hais les adieux, au revoir l'Iran !

*****

Ce pays m'a fascinée. Les zones désertiques alternent avec des villes développées, agrémentées de massifs de fleurs, d'arbres à l'ombre bienfaisante, même si les cours d'eau sont à sec. L'eau deviendrait un problème ? Pourtant les montagnes avoisinantes sont encore enneigées.

J'ai encore dans le nez les odeurs d'épices omniprésents dans les bazars, que l'on retrouve dans la cuisine subtilement parfumée.

Les palais iraniens, avec leurs bassins, leurs fontaines, leurs massifs de fleurs, leurs mosaiques colorées et leur dédale de pièces permettant la fraîcheur l'été et l'isolement du froid l'hiver m'ont, tel un voyage dans un conte, enchantée.

Rebutée par le voile des femmes, qu'elles portent pourtant de façon altière, avec leurs cheveux relevés dessous, par leur chador, qui malgré tout, je dois reconnaître, leur donne, outre l'anonymat, une certaine démarche légère et aérienne, j'ai râlé pour mettre pantalon long, longue tunique, plus le foulard par 24° (dire qu'en été ça monte au-delà de 40° !), ceci même pour aller prendre le petit-déjeuner à l'hôtel : c'est qu'on me privait là de ma liberté de choix. Et qu'on me l'imposait à moi, femme, et pas aux hommes....Sentiment de brimade et d'inégalité. D'ailleurs les portes anciennes ont deux heurtoirs : un rond pour les femmes, un long pour les hommes, chacun d'eux donnant une sonorité différente, afin de savoir qui demande l'entrant. Et dans les aéroports, la sécurité est séparée : les femmes d'un côté, les hommes de l'autre...On s'attend de l'autre côté ! A ce point, je comprends combien notre éducation nous formatte, et du coup je suis terriblement contente et soulagée d'être Française....Plusieurs contacts locaux nous ont pourtant dit qu'il ne fallait pas s'arrêter à cet aspect là, car tout Iranien a deux facettes : celle qu'il donne en public, et celle en privé, qui, photos à l'appui, prouve qu'entre eux, les réunions et les fêtes peuvent être débridées et aprfaitement occidentalisées.  D'ailleurs toutes les femmes ou presque sont maquillées, le soin étant porté sur des sourcils redessinés, comme peints. J'ai également remarqué beaucoup de faux-cils. En revanche j'ai vu peu de talons hauts, surtout des chaussures couvertes confortables, ou des baskets.

Une jeune fille nous a avoué que porter le chador lui évitait ainsi d'avoir des problèmes dehors (commentaires sur sa tenue vestimentaire, ou potentielle agression ?). Mais bien qu'affublées différemment, les copines se retrouvent en ville. Une femme abordée dans la rue de Yazd portait même le masque, comme on en avait rencontrées à Oman, accessoire de beauté, qu'elle considère comme librement consenti. Je préfère à tout prendre mon bâton de rouge à lèvres ! Mais j'ai vu dans les jardins de la mosquée une femme en aborder une autre parce que son chador ne couvrait plus bien sa tête, ce qui m'a rappelé les regards désapprobateurs que j'ai essuyés à mon arrivée à l'aéroport... J'ai vu aussi des couleurs très chatoyantes, surtout dans le Sud, les femmes assortissant leur manteau à leur foulard. Certes nous avons vu quelques mendiants, mais j'ai toujours eu l'impression que les gens, les enfants particulièrement, se portaient bien.  Partout j'ai vu des gens plutôt joyeux, attentifs à l'autre, (Ah ! ce respect de l'autre omniprésent en Asie aussi), très souvent en famille. On nous a dit que les Iraniens savaient se contenter de ce qu'ils avaient : sans doute une sage leçon.

A Shiraz, on nous a affirmé, de deux sources différentes, que les habitants avaient tous une maison secondaire à l'extérieur de la ville, sorte de de datcha, et les photos que l'on a vues avec piscine et jardin de 7000 m² font rêver !

Enfin, nous avons rencontré plusieurs personnes qui n'envoient pas leurs enfants dans les écoles coraniques, par choix délibéré.

De mon côté, très souvent, dans la rue ou au restaurant, de la part de femmes en chador ou juste voilées, j'ai reçu des sourires, un battement de cils, des petits signes de la main, des gens nous ont pris les mains pour nous souhaiter Welcome to Iran, nous prendre en photo : le simple fait qu'on vienne en touristes dans leur pays leur apporte réconfort et fierté. Qu'attendent-ils de nous ??? Il faudrait rester plus longtemps pour en débattre.

Partout nous avons reçu un accueil plus que chaleureux. Et pour cela je les remercie, ils ont fait de ce voyage une découverte précieuse, un moment inoubliable. En farsi : Merrrci !

Comments

[Vahid]

Dear friends Dominique and Alain.



I traveled around Iran with a lot of people from different countries but traveling with you was something else... I will never forget this travel and its beautiful memories with you and I hope to see you again.

wish you all the best.



sincerely yours

Vahid